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Revente d’un véhicule atteint de vices cachés, on ne refile pas la patate chaude

Revente d’un véhicule atteint de vices cachés, on ne refile pas la patate chaude

Le délai de deux ans pour mettre en œuvre la garantie légale des vices cachés commence à courir à compter de la découverte du vice. Celui qui serait tenté de revendre rapidement un véhicule atteint de graves défauts pour s’en débarrasser pourrait se retrouver dans l’incapacité de se retourner contre son propre vendeur s’il est assigné par la suite par un nouveau propriétaire plus de deux ans après son propre achat. C’est ce que vient de rappeler la Cour de cassation dans un arrêt du 15 juin 2022. Les conseils et les mises en garde de Jean-Baptiste le Dall avocat en Droit automobile, Directeur scientifique des Etats généraux du Droit automobile.

Avocat vices cachés automobiles BMW
BMW 645CI, une ligne sublime qui parfois peut cacher quelques vices

Le nouvel acquéreur d’un véhicule atteint de vices cachés pourrait être tenté de le revendre en se gardant bien de faire part de ses découvertes au futur propriétaire. Dans le langage quotidien, cela s’appelle refiler la patate chaude…

C’est ce qu’a tenté de faire le propriétaire d’une BMW 645 CI. Mais seulement voilà, le véhicule tombe en panne quatre mois seulement après la vente. Le nouveau propriétaire se retourne contre son vendeur et entend se prévaloir de la garantie légale de vice caché.

Si la panne est effectivement intervenue très rapidement après la cession opérée le 27 décembre 2012, le nouveau propriétaire n’a introduit son action à l’encontre du vendeur qu’en juillet 2015 après notamment de nombreux mois d’expertise.

L’assignation intervient le 27 février 2015, celui qui avait pensé se débarrasser rapidement d’un « véhicule à problèmes », que nous désignerons désormais sous le terme de « vendeur intermédiaire » sentant le vent tourner essaye de se retourner contre son propre vendeur.

Le vendeur intermédiaire appelle, donc le 2 juillet 2015, en garantie le vendeur originaire, un professionnel de l’automobile auprès de qui il avait acquis le coupé BMW à peine 5 mois avant de le revendre.

La stratégie adoptée par le vendeur intermédiaire n’a rien d’original, il est très fréquent qu’en cas de mise en cause judiciaire, un ancien propriétaire de véhicule se retourne contre son propre vendeur qui lui-même peut se retourner contre son propre vendeur, etc., etc. C’est ainsi que, dans certains dossiers, les mises en cause successives permettent de remonter jusqu’au constructeur automobile.

Un délai pour l’appel en garantie en matière de vices cachés automobiles

Un mis en cause qui souhaite se retourner contre son propre vendeur ne pourra, toutefois, le faire que s’il est encore dans les délais.

En matière de garantie légale des vices cachés le premier des délais à respecter est un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.

La question est régulièrement débattue de la date réelle de la découverte de ce vice. Il n’est pas rare dans les dossiers de vices cachés automobiles, que les parties en demande et en défense se réfèrent à des dates différentes. Il peut, en effet, s’écouler un certain temps entre la découverte de ce qui pourrait éventuellement être un problème et la confirmation que nous sommes effectivement en présence d’un vice caché.

Pour ce qui concernait cette BMW 645 CI, les expertises ont montré que le vendeur intermédiaire avait connaissance du problème, raison pour laquelle il s’était empressé de revendre ce véhicule.

A la date de cession du véhicule, le 27 décembre 2012, les conclusions des expertises et les constatations des juridiction saisies de ce litige permettent d’affirmer avec certitude que le vendeur intermédiaire avait connaissance du vice caché.

Le moyen produit par la société ayant vendu le véhicule à l’origine souligne « la présence de pâte à joint sur le moteur de la voiture évocatrice d’une intervention de fortune destinée à pallier un défaut d’étanchéité, et lors de l’expertise judiciaire, (la constatation de) la présence de marques et de repères de démontage des joints de cache culbuteur et de carter de distribution caractéristiques d’une longue et lourde opération sur le haut moteur d’où provient la fuite. De plus, [D] [M] a revendu le 27 décembre 2012 le véhicule qu’il avait acquis lui-même le 18 juillet 2012 après l’avoir conservé très peu de temps alors qu’il était supposé lui apporter un usage durable s’agissant d’une BMW 645 CI, modèle de haut de gamme construit par une grande marque suivant des méthodes de fabrication éprouvées. Ces éléments démontrent que contrairement à ses affirmations, [D] [M] avait connaissance du vice affectant le véhicule. »

Ce vendeur intermédiaire qui a tenté de se débarrasser de ce véhicule après une vaine tentative de réparation est assigné par son acheteur le 2 juillet 2015. A cette date, il est déjà trop tard pour lui pour se retourner contre son propre vendeur.

La cour de cassation l’explique de façon très claire :

« Vu l’article 1648, alinéa 1er, du code civil :

6. Aux termes de ce texte, l’action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l’acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.

7. L’arrêt déclare recevable l’appel en garantie formé le 2 juillet 2015 par le vendeur intermédiaire contre le vendeur originaire et condamne celui-ci à le garantir de l’ensemble des condamnations mises à sa charge au profit de l’acheteur final, après avoir constaté que, le 27 décembre 2012, lorsque le vendeur intermédiaire avait revendu le véhicule à l’acheteur final, il avait connaissance du vice qui l’affectait.

8. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que le vendeur intermédiaire avait agi contre le vendeur initial plus de deux ans après la découverte du vice, la cour d’appel, a violé le texte susvisé. 

11. La prescription de l’action en garantie formée par le vendeur intermédiaire contre le vendeur originaire étant acquise depuis le 28 décembre 2014, cette action est irrecevable.»

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 15 juin 2022, 20-12.440

La preuve de la connaissance du vice caché automobile

La mise en œuvre de la garantie légale des vices cachés n’implique aucunement de devoir rapporter la preuve de la mauvaise foi ou de la connaissance par le propriétaire précédent des problèmes affectant le véhicule.

La preuve de la connaissance par le vendeur des problèmes sur son véhicule pourra permettre à l’acheteur de formuler des demandes allant au-delà de la simple résolution de la vente. L’acheteur pourra notamment demander le remboursement d’un certain nombre de frais et l’indemnisation de son préjudice de jouissance.

Il est fréquent que la preuve de la connaissance des problèmes antérieurs à la vente se dégage assez rapidement alors des opérations d’expertise avec la découverte de travaux de carrosserie ou de peinture destinés à camoufler des désordres esthétique ou plus grave des problèmes de structure affectant, par exemple, le châssis du véhicule. La connaissance des vices antérieurs à la vente peut également se déduire, comme cela a été le cas dans cette affaire, de traces d’interventions ou de travaux entrepris pour tenter de mettre fin à l’avarie ou au défaut affectant le véhicule.  

Un délai de deux ans opposable au vendeur de véhicule de mauvaise foi

Dans cette affaire, le vendeur intermédiaire ne peut plus se retourner contre son propre vendeur, sa connaissance du vice étant prouvée au plus tard au moment de la revente du véhicule. S’il avait revendu le véhicule sans savoir que celui-ci était atteint de différents désordres, il aurait pu parfaitement appeler en garantie son vendeur.

On soulignera qu’il revient au demandeur, à l’acheteur insatisfait de prouver la mauvaise foi de son vendeur ou tout du moins la connaissance que pouvait avoir ce dernier des vices affectant le véhicule. Plus précisément c’est à celui qui souhaite se prévaloir de cette connaissance qu’il reviendra de la prouver. Dans cette affaire, il n’y avait que l’acheteur à vouloir démontrer la mauvaise, le vendeur originaire a pu également s’en prévaloir pour refuser sa garantie…

On déconseillera donc à l’acheteur ayant la malchance d’avoir fait l’acquisition d’un véhicule affectés de nombreux défauts soigneusement tus par le vendeur de le revendre pour refiler la patate chaude à un autre automobiliste. La revente du véhciule est le meilleur moyen de se faire assigner et dans le pire des cas il sera trop tard pour se retourner contre son propre vendeur !

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Crédits image : Pixabay

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