Skip to content

Acheter sans le savoir un véhicule gravement endommagé : des recours, vice caché, dol ?

Acheter sans le savoir un véhicule gravement endommagé : des recours, vice caché, dol ?

Acheter un véhicule d’occasion peut, parfois, entraîner de mauvaises surprises comme, par exemple, la découverte d’un lourd passé côté réparations avec un passage par le statut VGE- Véhicule Gravement Endommagé. Existe-t-il un recours pour l’acheteur d’un tel véhicule : obligation de délivrance conforme, vice caché, dol, obligation de conseil ??? Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en Droit fait le point sur les recours qui peuvent être envisagés pour l’acheteur s’estimant lésé.

recours véhicule VGE vices cachés avocat
L’acquéreur de ce coupé fiat turbo pourrait tomber dans les pommes en découvrant la procédure VGE

Véhicule gravement endommagé : une procédure spécifique

La procédure de véhicule gravement endommagé (VGE), procédure spécifique qui a succédé à l’ancienne procédure VGA : véhicule gravement accidenté, peut être initiée par les forces de l’ordre ou par un expert en automobile. On imagine, par exemple, des agents de police missionnés sur un accident de la circulation qui constatent un véhicule ayant perdu une roue et dont l’avant est totalement embouti après avoir été percuté. Ces agents suspecteront une dangerosité du véhicule et pourront initier la procédure VGE. Cette procédure peut, également, être initiée par un expert en automobile qui, par exemple, se rend chez un réparateur examiner le véhicule d’un assuré ayant été accidenté et qui tomberait nez à nez avec un véhicule remplissant les critères de dangerosité de cette procédure VGE.

Le déclenchement de la procédure VGE va se traduire par une opposition au transfert du certificat d’immatriculation et une interdiction de circulation pour ce véhicule. En d’autres termes, il n’est plus possible de vendre ce véhicule ou de le faire circuler.

Pour pouvoir mettre fin à ces mesures de restriction, le véhicule devra être réparé et surtout suivi par un expert en automobile. Cet expert en automobile va établir à l’issue de ces réparations, un rapport attestant que le véhicule n’a pas fait l’objet de transformation notable, que toutes les réparations nécessaires à la sécurité du véhicule ont bien été réalisées dans les règles de l’art, et que le véhicule est désormais, en état de circuler dans des conditions normales de sécurité.

« Lorsqu’un expert en automobile constate qu’en raison de son état un véhicule ne peut circuler dans des conditions normales de sécurité, il en informe l’autorité administrative compétente, sans que puissent y faire obstacle les règles relatives au secret professionnel. L’autorité administrative compétente avise le propriétaire de l’interdiction de circulation de son véhicule et procède à l’inscription d’une opposition au transfert du certificat d’immatriculation jusqu’à la remise de ce document. »

Le véhicule n’est remis en circulation qu’au vu d’un rapport d’un expert en automobile certifiant que ledit véhicule est en état de circuler dans des conditions normales de sécurité. »

Article L327-5 du Code de la route

Pour certains de ces véhicules, les réparations, s’avéreront extrêmement lourdes et pourront éventuellement inquiéter un futur acquéreur.

Face à un passé caché, l’acheteur d’un véhicule, ayant fait l’objet d’une procédure spécifique de véhicules gravement endommagé devra tout d’abord s’interroger sur le fondement légal d’une éventuelle action.

Au-delà des considérations juridiques et des souhaits du nouveau propriétaire : remise en état du véhicule, indemnisation ou résolution de la vente, le choix d’un fondement légal ou d’un autre dépendra également grandement de l’état du véhicule.

Dans certains cas, l’accident et la procédure VGE auront été cachés à l’acheteur potentiel, dans d’autres cas plus graves, l’historique du véhicule a été dissimulé, mais ce véhicule aura également été réparé à la hâte et présentera encore de graves défauts.

Véhicule VGE pas ou mal réparé : vices cachés ?

Si les réparations effectuées dans le cadre de la procédure VGE laissent subsister des défectuosités suffisamment graves pour rendre le véhicule impropre à son usage, le nouveau propriétaire pourra mettre en œuvre la garantie légale des vices cachés.

La gravité des défauts rendant le véhicule impropre à son usage

C’est par exemple ce qu’a jugé la Cour d’appel de Toulouse dans un arrêt de septembre 2019. On notera également dans cette affaire (rapportée ci-après) qu’outre la gravité des vices, se pose la question de la méthodologie de réparation. En l’absence de documentation liée à la procédure VGE, à partir du moment où subsistent des défauts ou des avaries mal réparées, le nouveau propriétaire peut légitimement s’interroger sur la qualité des réparations du point de vue de leur tenue dans le temps ou même du point de vue de la sécurité… Un rapport de conformité est normalement établi par l’expert en automobile dans le cadre du suivi des réparations qu’il assure au titre de la procédure VGE. On retrouvera dans ce rapport des photos du véhicule avant démontage, pendant les réparations et après, les factures et la provenances des pièces utilisées, les dates des visites de contrôle de l’expert, l’identité des intervenants…Ce rapport est adressé au propriétaire du véhicule qui peut parfaitement le transmettre à un nouveau propriétaire lorsqu’il cède le véhicule. Dans les dossiers qui nous intéressent dans le cadre de cet article, par définition ces rapports ne sont pas transmis au nouveau propriétaire qui ignorait jusqu’à la survenance de cette procédure. Pour certains véhicules il sera tout simplement impossible d’avoir la certitude que les réparations ont été faites dans les règles de l’art. On pense, par exemple, aux soudures : l’intérêt du suivi par un expert automobile réside dans l’examen qu’il pourra faire de ces soudures avant la pose de produit d’apprêt et la mise en peinture…

Retour sur cet arrêt de la Cour d’appel de Toulouse du 12 septembre 2019

Le rapport d’expertise de Monsieur Z a été dressé au contradictoire de chacune des parties à cette vente. Les diligences de l’expert ont révélé que le véhicule présente des déformations importantes sur le pied avant gauche et l’encadrement de la porte avant gauche. Ces désordres à eux seuls ne sont pas susceptibles de rendre le véhicule impropre à sa destination.

Cependant ils ont conduit l’expert à rechercher l’historique du véhicule qui a révélé qu’il avait fait l’objet d’un accident le 27 novembre 2014 sur le tiers avant gauche, justifiant une procédure de véhicule économiquement irréparable et de véhicule gravement endommagé à la suite duquel des réparations ont été entreprises. Aucun élément n’est produit sur la nature et la méthodologie des réparations nécessairement importantes qui ont été réalisées, alors que le remplacement de pièces de sécurité étaient préconisées après l’accident -berceau moteur, demi-train avant gauche- et qu’il est apparu que des pièces d’occasion ont été remployées.

L’expert en conclut que le véhicule nécessite une remise en état et des contrôles complémentaires de sorte qu’il ne peut être utilisé sur les voies publiques.

Il en résulte que les désordres affectant le véhicule dans ses fonctions vitales ne s’étant révélés qu’à l’occasion des diligences de l’expert, étaient cachés au sens de l’article susvisé, et rendaient le véhicule impropre à sa destination, les désordres déclarés dans l’annonce du bon coin ne visant que le dysfonctionnement de la capote et un choc arrière droit alors que le siège du sinistre du 27 novembre 2014 se situe sur le tiers avant gauche.

C’est donc à bon droit que le premier juge a prononcé la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés, condamné Madame X à restituer le prix de vente.

Cour d’appel de Toulouse, 3ème chambre, 12 septembre 2019, n° 18/04267

Des défauts qui s’ils avaient été connus auraient amener l’acheteur à en donner un moindre prix

On se rappellera, en effet, la teneur des dispositions de l’article 1641 du Code civil : « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. »

La question de la moindre valeur se posera souvent en présence de véhicule VGE mal réparés puisque par définition cette procédure a vocation à être déclenchée en présence d’avaries graves et l’absence de garantie sur la qualité des interventions amènera le nouveau propriétaire à devoir refaire faire les travaux s’il veut rouler sereinement… Assez vite l’addition risque de devenir conséquente. Si le nouveau propriétaire avait dû intégrer dans son offre d’achat ces montants, il aurait dans la plupart des cas revu sa proposition à la baisse… C’est par exemple ce qu’ont retenu les juges versaillais dans un arrêt de juin 2018 :

« les constatations réalisées sur ce véhicule (dont le compteur du kilométrage fait ressortir qu’il n’a roulé que 131 km depuis son acquisition par Mme Y) indiquent que celui-ci a été partiellement réparé suite au sinistre expertisé par notre confrère le 10 août 2012,

des réparations de fortune ont été effectuées peu de temps avant le contrôle technique réalisé le 26 mars 2014.

aucune traçabilité n’a pu être recherchée relativement à la mainlevée de la procédure ‘véhicule gravement endommagé’, qui a permis de réaliser la vente.

ces désordres sont imputables aux vendeurs, à savoir M. A puis M. Z.

compte tenu des réparations de fortune réalisées sur le véhicule, la remise en état est la même que celle indiquée sur le rapport d’expertise de notre confrère soit environ 5 800 euros TTC auxquelles viennent s’ajouter les frais de réparation liés à la surchauffe moteur d’un montant de 1 028,57 euros.

Ainsi que l’a justement relevé le premier juge, il est constant que lors de la conclusion de sa vente, le véhicule était affecté de vices et que ceux-ci étaient cachés et qu’il est évident que si Mme Y en avait eu connaissance, elle ne l’aurait pas acquis ou n’en aurait certainement proposé qu’un moindre prix. »

Cour d’appel de Versailles, 1re chambre 2e section, 5 juin 2018, n° 16/07985

On pourra également citer un arrêt de la Cour d’appel de Montpellier du juillet 2020 à propos d’une moto d’une « catégorie ultra puissante » :

L’usage auquel on destine une moto, surtout de cette catégorie ultra puissante, est de rouler en toute sécurité ; Le simple fait de rouler, et de l’avoir fait jusque-là sans accident, ne suffit pas, pas plus que la discussion sur la différence entre un véhicule économiquement irréparable et un véhicule gravement endommagé qui est retiré de la circulation ; En l’espèce, ainsi que l’a retenu le premier juge, il résulte de l’expertise contradictoire diligentée courant 2016 que cette motos était gravement accidentée en 2012, classée dans la catégorie des véhicules économiquement irréparables et qu’elle présente au jour de l’expertise un défaut au niveau du cadre avant qui est enfoncé des deux côtés et qui présente selon l’expert pour ce motif un affaiblissement que certaines réparations effectuées n’ont pas permis de faire disparaître’; Il s’en déduit en toute hypothèse qu’en présence d’un véhicule économiquement irréparable, et dont les réparations n’ont pas permis de remettre en état le cadre, Monsieur Y n’aurait pas payé le prix qu’il a consenti à Monsieur X’; Cette anomalie est de nature à compromettre la rigidité et partant la sécurité de l’engin et constitue bien un vice caché rendant impropre l’engin à sa destination quand bien même il a continué à être utilisé par ses propriétaires successifs depuis 2012, sauf à imaginer que l’on puisse utiliser sans une sécurité optimale une moto de cette puissance ; Il sera donc fait droit au subsidiaire de Monsieur X, appelant, qui entend exercer l’action rédhibitoire »   

Cour d’appel de Montpellier, 4e chambre civile, 1er juillet 2020, n° 17/06557

Un véhicule bien réparé mais dont l’historique porte la trace indélébile d’une procédure VGE

Mettons-nous quelques instants dans la peau d’un acheteur lambda en quête d’une petite citadine d’occasion. Si la possibilité lui est offerte de choisir entre deux véhicules peu ou prou similaires avec un kilométrage et un prix quasi identique, cet acheteur portera certainement son choix vers le véhicule n’ayant pas été impliqué dans un accident, subi de lourdes réparations ou une procédure VGE. Il préférera très certainement le véhicule à l’historique limpide…

Pour autant, la dissimulation de l’historique du véhicule et notamment de la survenance d’un vice cachés permet-elle d’envisager un recours en justice ? Et sur quel fondement ?

Véhicule au lourd passé : peut-on faire jouer la garantie des vices cachés ?

Confronté à cette question en matière de vices cachés la Cour de cassation a estimé qu’à partir du moment où des réparations ont été faites dans les règles de l’art, des interventions même lourdes n’affectent en rien le véhicule et ne rendent aucunement celui-ci impropre à l’usage auquel il est destiné (Cass. Civ. 1re, 17 juin 2010, n° 09-15843). Pour la Cour de cassation, de lourdes réparations bien réalisées ne justifient par la résolution d’une vente sur le fondement de la garantie légale des vices cachés. La Cour de cassation se montrera, par contre, plus sévère en présence d’un passage au marbre. C’est ce qu’il ressort clairement de son arrêt du 11 décembre 2013 : « attendu que pour rejeter la demande de M. X… tendant au prononcé de la résolution de la vente, à la restitution du prix et au versement de dommages-intérêts, l’arrêt, après avoir relevé que l’expert judiciaire s’était borné à conclure que la revente à un particulier, même en informant celui-ci, était impossible, retient qu’une telle difficulté ne saurait être considérée comme un vice diminuant l’usage du véhicule puisque celui-ci peut normalement rouler ; Qu’en se déterminant ainsi alors que la restriction à la possibilité de revendre le véhicule constituait un défaut caché qui en affectait l’usage, la cour d’appel a violé le texte » (Cass. Civ.1re, 11 décembre 2013, n° 12-23372).

Le terme de passage au marbre même s’il recouvre des situations qui n’ont parfois rien à voir du point de vue de l’importance des défauts et des travaux à entreprendre, même si sa signification demeure en réalité ignorée du grand public, ce terme de passage au marbre fait peur… et rendra la revente difficile…

La peur pourra même laisser la place à l’effroi quand, par exemple, le véhicule n’a pas subi « un » mais « deux » passages au marbre et n’a pas fait l’objet d’une procédure VGE… mais de deux… C’est qu’avait connu un véhicule que le Tribunal de commerce de Nice avait eu à connaitre dans le cadre d’une vente litigieuse et pour lequel la résolution avait été prononcée.

« Attendu que ce véhicule a donc subi deux « passage au marbre » et que la SARL aurait dû informer son client de l’historique de cette voiture selon la procédure VGE qui consiste à suspendre en préfecture la validité de la carte grise en attente des travaux de remise en état, et à en informer le nouveau propriétaire du véhicule ; »

Tribunal de commerce de Nice, Chambre 5 contentieux général, 22 janvier 2016, n° 2015F00483

La Cour de cassation ne s’est pas à jour prononcée sur la question de la procédure VGE dont on pourra toutefois reconnaître qu’elle reste largement ignorée du grand public et que dès lors son effet « repoussoir » pourrait demeurer limité. Certaines juridictions de première instance examineront surtout cette question sous l’angle de la conformité du véhicule par rapport à son usage routier. Le véhicule est-il encore capable de répondre à son usage ?

Toutefois, ainsi que le relève Y Z, l’expert ne fournit aucun élément permettant, en l’état des chocs successifs subis par le véhicule, de déterminer l’origine exacte de ces dommages.

Dès lors que le véhicule a été reconnu en état de circuler dans des conditions normales de sécurité après les réparations des chocs subis en février 2010, les vices allégués ne sont pas d’une gravité telle qu’ils rendaient le véhicule impropre à son usage.

Les consorts X B ne sont donc pas fondés en leur demande de résolution de la vente et le jugement doit être infirmé.

Cour d’appel de Grenoble, 1ere chambre, 27 février 2018, n° 16/00158

Mais la garantie légale des vices cachés ne constitue pas pour un vendeur sa seule obligation, il est également tenu à une obligation de délivrance conforme. Par obligation de délivrance conforme, on entendra la délivrance conforme par rapport aux spécifications techniques et administratives du véhicule mais également par rapport à ce qui avait été convenu entre les parties au contrat.

Violation de l’obligation de délivrance conforme en cas de découverte de procédure VGE ? 

La Cour d’appel de Lyon a eu à se pencher sur cette question à propos d’une DS3 Racing et a écarté la violation de délivrance conforme :

« L’expert [P] a relevé que le véhicule vendu répondait aux modèle et spécifications techniques convenus entre Monsieur [E] et les consorts [V]/[U]. Pour conclure néanmoins au manquement de ses vendeurs à leur obligation de délivrer une chose conforme, Monsieur [E] soutient qu’il résulterait implicitement mais nécessairement de l’absence de mention de la survenance antérieure d’une procédure « véhicule gravement endommagé » dans le carnet d’entretien et les factures de réparation communiqués au moment de la cession, du paiement d’un prix supérieur à la cotation argus et de l’affirmation faite par le vendeur, sur le certificat de cession, de l’absence de modification notable du véhicule, la preuve de ce que les parties étaient convenues de faire porter la vente sur un véhicule n’ayant jamais subi d’accident significatif.

Il ajoute plus généralement que la vente d’un véhicule de sport postulerait la même exigence.

La cour juge cependant que la vente d’un véhicule sportif n’implique pas l’obligation faite au vendeur de fournir une automobile n’ayant jamais souffert d’accident, sanctionnée par l’obligation de délivrance, mais celle de céder une voiture présentant des performances élevées, sanctionnée par la garantie des vices cachés.

La cour relève également que l’indication portée en page 11 des conclusions des consorts [V] [U], sur laquelle Monsieur [E] se fonde pour soutenir que les intéressés auraient fait l’aveu judiciaire de ce que la fiabilité des organes sécuritaires et de performance du véhicule participait des caractéristiques essentielles de la chose vendue et revêtait un caractère contractuel, constitue en réalité une citation de ses propres conclusions, et non l’affirmation de ses vendeurs.

Elle n’emporte donc pas aveu judiciaire.

En outre, l’indication faite dans le certificat de cession de l’absence de modification notable portée au véhicule renvoie à l’article R 321-16 du Code de la Route, aux termes duquel « tout véhicule isolé ou élément de véhicule ayant subi des transformations notables est obligatoirement soumis à une nouvelle réception. Le propriétaire du véhicule ou de l’élément de véhicule doit demander cette nouvelle réception au préfet ».

La liste des modifications notables au sens de cette disposition figure à l’article 13 de l’arrêté du 19 juillet 1954 et Monsieur [E] n’établit pas en quoi le véhicule litigieux aurait subi l’une de ces transformations, à effet d’emporter délivrance non conforme.

De manière plus générale, la mention de l’absence de modification notable dans un certificat de cession a pour seul objet de répondre aux obligations réglementaires prévues en matière de réception administrative et ne saurait, de par cet objet limité et précis, emporter convention de livrer un véhicule n’ayant jamais souffert d’accident.

Le règlement par Monsieur [E] d’un prix de vente supérieur à l’argus et l’absence de mention de la procédure « véhicule gravement endommagé » survenue en 2014 sur le carnet d’entretien et les factures de réparation communiquées à l’acquéreur ne suffisent enfin à présumer la commune volonté des parties de faire porter la vente sur un véhicule non accidenté, quand même porterait-elle sur un véhicule de sport.

La preuve n’est donc pas rapportée de ce que les parties seraient convenues de la cession d’un véhicule n’ayant jamais subi d’accident et il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a prononcé la résolution de la vente sur le fondement du manquement des consorts [U]/[V] à leur obligation de délivrance. »

Cour d’appel de Lyon, 1re chambre civile a, 20 octobre 2022, n° 20/04547

Dans cette affaire la résolution de la vente de la DS 3 Racing n’a pas été prononcée pour une violation de l’obligation de délivrance conforme mais en application de la garantie légale des vices cachés, les réparations ayant effectuées ayant laissé subsister des défauts importants. On aurait pu imaginer une autre issue si les parties avaient rédigé un contrat de vente spécifiant une absence de procédure VGE…

Et le dol en cas de découverte tardive d’une procédure VGE?

L’article 1137 du Code civil explique que « le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »

Le dol pourrait ainsi retrouver à s’appliquer en présence d’un vendeur dissimulant sciemment la survenance d’une procédure VGE alors qu’il sait que son acquéreur attache de l’importante à un historique limpide. Le fait de vouloir acheter un véhicule au passé rassurant sans intervention majeure ou accident n’étonnera personne lorsque le véhicule objet de toutes les convoitises est un véhicule sportif ou premium.

avocat vices cachés VGE Maserati
Un cabriolet Maserati qui pourrait avoir fait l’objet d’une procédure VGE. Pour ne pas se faire avoir comme un bleu : un petit tour sur le site Histovec !

C’est à ce genre de problématiques qu’a été confrontée la Cour d’appel d’Aix en Provence en présence d’un véhicule sortant un peu du lot : une Maserati Grancabrio d’occasion affichant 36 750 kilomètres au compteur vendue 75 382 euros.

« Sur le dol

Aux termes des articles anciens 1108, 1109 et suivants du code civil applicables au présent litige, ll n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.

M. [S] [K], sur qui pèse la charge de la preuve de la caractérisation des manœuvres dolosives qu’il reproche à la Simva, reproche à celle-ci de ne pas l’avoir informé de l’ampleur des dégâts subis par le véhicule avant son acquisition.

Il est néanmoins justifié par la venderesse que celle-ci a apposé sur le bon de commande la mention suivante : « le client est informé que le véhicule vient d’être réparé d’un choc avant dans le réseau Maserati. Le véhicule est totalement conforme aux règles de fonctionnement ».

Certes la notion de véhicule gravement endommagé n’a pas été mentionnée sur ce bon de commande, mais il est cependant justifié par la Simva que celle-ci avait procédé aux réparations rendues nécessaires par le choc et surtout, qu’elle avait obtenu de la préfecture l’autorisation de mettre le véhicule à nouveau sur le marché par les services préfectoraux.

Le fait par conséquent, que la société venderesse n’ait pas utilisé le terme de véhicule gravement endommagé sur le bon de commande ne peut être caractérisé de manœuvre dolosive.

Il convient par conséquent d’infirmer le jugement en ce qu’il a retenu un dol à l’encontre de la Simva et de débouter M. [S] [K] de sa demande en annulation de la vente sur ce fondement.

Cour d’appel d’Aix-en-Provence, Chambre 1 1, 7 mars 2023, n° 19/12768

Pour la petite histoire, dans cet arrêt, la résolution de la vente a quand même été prononcée mais sur le fondement de la garantie légale des vices cachés le véhicule présentant toujours de graves défauts.

Le dol qui peut être une piste pour un acheteur malheureux implique toutefois de rapporter la preuve de manœuvres ou le fait que le vendeur connaissait l’importance pour l’acquéreur d’un historique limpide et de l’absence de procédure VGE. La démarche ne relève, toutefois, pas de l’impossible surtout en présence d’un vendeur professionnel et surtout si celui-ci communique de façon parcellaire sur le véhicule qu’il propose. C’est ce qu’a pu rappeler la Cour de cassation dans un arrêt du 12 janvier 2012 à propos d’une BMW m3 E46.

L’ampleur du VGE a été dissimulé par le professionnel : dol

Vu l’article 1116 du code civil ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a acquis de la société Patrick Metz, au prix de 51 500 euros, un véhicule BMW M3 ayant parcouru 1 600 kilomètres, selon bon de commande, du 20 janvier 2006, portant la mention « véhicule accidenté réparé dans les règles de l’art » ; qu’au vu d’un rapport d’expertise judiciaire révélant que, contrairement aux déclarations de l’employé de la société faisant état d’une simple aile froissée, le véhicule avait été gravement endommagé, ce qui avait nécessité d’importantes réparations pour plus de 38 000 euros, M. X… a assigné la société venderesse en « résolution » de la vente pour dol et manquement du vendeur à ses obligations contractuelles ;

Attendu que pour rejeter l’action, l’arrêt énonce que l’employé de la société a précisé à l’expert ne pas savoir ni avoir pu savoir le dommage causé au véhicule vendu ni quelles réparations il avait subies et situé sa déclaration relative « au froissement d’une aile » bien avant la vente, en dehors de toute opération de commande, que M. X… sachant expressément par le bon de commande que le véhicule avait été accidenté, l’on chercherait en vain comment il aurait pu être trompé, que s’il avait fait de l’ampleur exacte de l’accident et de la réparation un élément déterminant de son consentement, il aurait demandé une copie de la facture de réparation ou aurait pris des dispositions pour connaître ce qui avait été réparé, ce qu’à aucun moment il ne justifie avoir sollicité ;

Qu’en statuant ainsi alors que constitue un dol le fait, pour le vendeur professionnel, tenu d’une obligation de renseignement et d’information envers l’acquéreur profane, de présenter un véhicule comme « réparé dans les règles de l’art », tout en reconnaissant avoir déclaré avant la vente que l’accident avait été limité à une aile froissée, puis ensuite avoir tout ignoré de l’ampleur de l’accident que ce véhicule avait subi et des modalités des réparations effectuées, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;

Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 janvier 2012, n°10-23.250
avocat vices cachés BMW VGE Accidentée

La position de la Cour de cassation n’est pas nouvelle, on pourra, par exemple, rappeler un arrêt de 1994.

Mais attendu qu’après avoir constaté qu’il résultait des documents produits aux débats et non contestés par M. Y… que le véhicule avait été gravement endommagé à la suite d’un accident survenu antérieurement à la vente, et que Mme X… n’aurait pas accepté de payer le prix demandé, supérieur à la cote de l’argus, ou même n’aurait pas acquis le véhicule si elle en avait été avertie, l’arrêt retient qu’en s’abstenant volontairement d’informer sa co-contractante de l’état réel du véhicule, M. Y… s’était rendu coupable d’un dol par réticence ; que, par ces seuls motifs, qui ne modifient pas l’objet du litige, la cour d’appel a légalement justifié sa décision d’allouer à Mme X… des dommages-intérêts dont elle a souverainement fixé le montant ;

Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 15 novembre 1994, n°92-18775

On rappellera que le professionnel sera présumé avoir connaissance du passé du véhicule. C’est ce qu’a pu rappeler la Cour d’appel de Basse-Terre dans un arrêt du 24 juin 2019

Au fond, M. X reproche à son vendeur d’avoir commis à son égard une réticence dolosive, c’est-à-dire de s’être volontairement abstenu de l’informer au moment de la signature du contrat de ce que le véhicule vendu avait été préalablement à l’acquisition litigieuse gravement accidenté.

Or, un tel comportement ne peut être constitutif d’un dol que si le vendeur lui-même avait connaissance du vice affectant le véhicule vendu.

En l’espèce, l’EURL Pat Auto soutient qu’elle ignorait le fait que le véhicule litigieux avait été gravement accidenté, dans la mesure où’:

— elle avait reçu mission de le vendre, dans le cadre d’un dépôt-vente par la société Caz Ocaz, qui en était en réalité propriétaire,

— elle n’avait aucune compétence en matière mécanique.

De tels arguments ne pourront qu’être écartés, s’agissant d’une vente consentie par un professionnel à destination d’un simple profane. En effet, dans une telle hypothèse, le vendeur professionnel est présumé connaître les caractéristiques essentielles du véhicule vendu, ainsi que les vices y afférents.

Ainsi, l’EURL Pat Auto ne pouvait ignorer que le véhicule qu’elle proposait à la vente avait été préalablement gravement accidenté, notamment au vu du certificat de nouvelle mise en circulation du véhicule. En omettant d’informer l’acquéreur de cet état de fait la société venderesse a commis à son égard une réticence dolosive.

Cour d’appel de Basse-Terre, 2ème chambre, 24 juin 2019, n° 17/01678

On terminera ces propos par rappeler que le professionnel reste soumis à une obligation de conseil

Obligation de conseil du professionnel

Le professionnel engage sa responsabilité s’il manque à son obligation d’information et son devoir de conseil. Le professionnel qui reste muet sur cette question pourra donc être condamné à indemniser son client. P

Attendu que la SARL AM AUTO 06 n’a pas respecté son obligation d’information, de conseil, de fiabilité, de sécurité en cas de revente de véhicule VGE ;

Tribunal de commerce de Nice, Chambre 5 contentieux général, 22 janvier 2016, n° 2015F00483

L’obligation de conseil du professionnel pourra également prise en compte par la juridiction pour retenir le dol :

La société SIN-AUTO s’est donc tue intentionnellement même s’il n’y a pas intention de nuire à Monsieur Z Y puisque le véhicule a été, dans le cadre de la procédure VGE, après réparations effectuées, déclaré en état de circuler dans des conditions normales de sécurité.

Il pesait sur la société SIN-AUTO une obligation d’information et son silence intentionnel sur l’accident et ses suites, ne peut qu’être sanctionné.

Ce défaut d’information a eu pour effet de vicier le consentement de Monsieur Z Y qui n’aurait pas contracté ou aurait contracté à d’autres conditions s’il avait été pleinement renseigné.

Tribunal de grande instance d’Évry, 3e chambre, 12 mai 2017, n° 16/05822

VGE comment éviter d’acheter un véhicule ayant fait l’objet d’un procédure Véhicule Gravement endommagé

L’acquéreur potentiel d’un véhicule pourra demander à son vendeur de lui transmettre le rapport Histovec qui fera mention de tels antécédents (procédure VGE ou désormais procédure VRC pour véhicule à réparations contrôlées). Histovec a été mis en place par l’administration et son accès est totalement gratuit, il suffit pour y accéder d’avoir le numéro du Certificat d’immatriculation et le nom du propriétaire…

Contacter Maître le Dall pour une étude de votre dossier :

Avocat permis de conduire par téléphone

ledall@maitreledall.com

09 70 24 04 48

06 64 88 94 14 (ligne professionnelle)

2023 LE DALL AVOCATS

Droit automobile – Droit des mobilités –

Avocat permis de conduire

Image par Netto Figueiredo de Pixabay

Image par Toby Parsons de Pixabay

Jake Thomas, CC BY-SA 4.0 https://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0, via Wikimedia Commons

Partager l'information

Dernières actualités