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Vices de procédure en matière de contravention ou de délits routiers : comment les exploiter en 2023 ?

Vices de procédure en matière de contravention ou de délits routiers : comment les exploiter en 2023 ?

Le vice de procédure, c’est souvent le dernier espoir pour des conducteurs poursuivis pour délits routiers. Un vice de procédure peut, en effet, suffire à faire tomber toute la procédure pénale et conduire à la relaxe du conducteur. Néanmoins, la moindre erreur ne constitue pas forcément un vice de procédure et celui-ci ne pourra pas forcément être soulevé n’importe comment et à n’importe quel moment. Les explications de Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en Droit.

avocat vices de procédure
Les vices de procédure pour faire échec et mat à des poursuites pour délits routiers?

Des vices de procédure fréquents en droit pénal routier

Sans doute plus qu’une autre matière, le droit pénal routier est un terreau propice aux vices de procédure. La matière est, en effet, complexe et riche de très nombreux textes dont la violation pourra vicier la procédure. Le dispositif de répression en matière de délinquance routière tel qu’il a été conçu en France fait également massivement recours aux appareils de métrologie légale : cinémomètres, éthylomètres …

L’utilisation de ces appareils est strictement encadrée par les textes et la jurisprudence : ces appareils doivent être homologués et doivent être vérifiés périodiquement, toutes ces opérations sont reportées dans un carnet métrologique dont l’avocat du conducteur pourra solliciter la communication…

Vice de procédure et vice de procédure

N’importe quelle erreur ou approximation dans une procédure pénale ne va pas forcément entraîner la remise en cause de celle-ci.

Les textes (nullité textuelle) et la jurisprudence pourront, dans certains cas, indiquer d’emblée que telle ou telle irrégularité entraînera automatiquement la nullité de la procédure.

Pour les nullités d’ordre public (on pense par exemple à une question de compétence de la juridiction) le magistrat qui y serait confronté n’aura pas à se poser la question de la réalité des griefs causés par ce manquement aux justiciables.

Pour les autres cas de figure, pour les nullités d’intérêt privé, le magistrat devra s’interroger sur les griefs causés à l’intéressé par le prétendu vice de procédure. Sans grief, pas de nullité ! On le comprendra rapidement une simple erreur de plume, une erreur d’orthographe n’aura, ainsi, pas véritablement d’impact sur la procédure puisqu’elle n’entraînera aucun grief pour le conducteur. Mais dans certains cas, une simple rature pourra jeter le discrédit sur toute la procédure… il en sera ainsi pour une date de vérification périodique d’un cinémomètre qui laisserait planer le doute sur la régularité de la mesure…

« En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d’une demande d’annulation ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu’elle concerne. »

Article 802 du Code de procédure pénale

Pour bon nombre de moyens de nullité soulevés en droit pénal routier, les juridictions devront se poser la question du grief, la jurisprudence pourra leur permettre de trancher rapidement et ce d’autant plus si la Cour de cassation a déjà pris position.

On pourra ainsi prendre l’exemple de la notification du taux en matière d’alcool au volant qui doit être opérée immédiatement dès le résultat affiché par l’éthylomètre. Un taux incohérent avec sa consommation d’alcool pourra inciter un conducteur à souffler à nouveau dans l’appareil de contrôle… L’absence de notification du taux ou une notification tardive pourra donc vicier la procédure sauf si la deuxième mesure a été effectuée d’office par les agents. C’est ce qu’explique la Cour de cassation qui en conclue que dans cette hypothèse il n’existe plus aucun grief pour le conducteur.

« Attendu que, pour confirmer le jugement ayant rejeté l’exception prise de ce que le résultat de la mesure du taux d’alcool n’avait pas été notifié immédiatement au demandeur qui n’aurait pas signé le procès-verbal de notification, l’arrêt relève que les enquêteurs ont attendu que l’intéressé soit complètement dégrisé et soit en mesure de comprendre les dispositions légales portées à sa connaissance ; que les juges ajoutent que les enquêteurs ont procédé d’office à un second contrôle de l’alcoolémie et que le prévenu ne peut exciper d’aucun grief tiré de la notification prétendument tardive ;

Attendu qu’en statuant ainsi, et dès lors que, d’une part, les dispositions de l’article R. 234-4 du code de la route, prescrivant la notification immédiate des résultats de la vérification d’alcoolémie, ont pour seul objet de permettre un second contrôle qui, en l’espèce, a eu lieu d’office, d’autre part, le demandeur a signé le procès-verbal de notification simultanée des deux contrôles, la cour d’appel a justifié sa décision ; »

Cass. Crim, 15 décembre 2015, n°14-85565

Des vices de procédure qui ne font pas forcément tomber toute la procédure

Il n’est pas rare que, pour le conducteur en infraction, l’histoire commence par une garde à vue. Cette mesure de privation de liberté est bien sûr strictement encadrée par les textes, dont la violation pourra constituer un vice de procédure. La violation des droits de la personne placée en garde pourra entraîner la nullité de certains mais pas forcément de l’intégralité de la procédure. C’est ce qu’a eu l’occasion de rappeler la Cour de cassation à de nombreuses reprises notamment en matière de conduite sous l’empire d’un état alcoolique.

Attendu que, saisie par Denis X…, poursuivi notamment pour conduite en état alcoolique et violences avec arme, de conclusions tendant à l’annulation de pièces de procédure, soutenant qu’il avait été retenu en dehors de tout cadre juridique le 9 octobre 2002 de 16 heures 50 à 20 heures dans les locaux du commissariat de police de Brest alors qu’il aurait dû être placé en garde à vue avec notification de ses droits, la cour d’appel de Rennes a annulé le procès-verbal d’audition de Denis X… du 9 octobre 2002 à 19 heures 20 ;

Attendu que, pour refuser d’étendre l’annulation au procès-verbal d’interpellation et à la procédure de contrôle d’alcoolémie, l’arrêt énonce que ces actes ont été accomplis soit avant l’arrivée du prévenu au commissariat soit juste après son arrivée dans les locaux de police ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel a justifié sa décision ;

Qu’en effet, la nullité d’un acte de procédure est sans effet sur les actes antérieurs régulièrement effectués ;

Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Cass. Crim. 2 septembre 2005, n°04-87032

Le dépôt de conclusions s’articulant autour d’une nullité de la mesure de la garde à vue ne sera pour autant pas à négliger en matière d’alcool au volant puisque c’est parfois sur les déclarations du conducteurs qu’un tribunal se fondera pour le condamner pour des faits de conduite en état d’ivresse manifeste…

Des moyens de nullité à soulever in limine litis

Des moyens de nullité qui pointent du doigt tel ou tel vice de procédure devront être invoqués in limine litis c’est-à-dire avant toute défense au fond (Cf. Article 385 du Code de procédure pénale)

En pratique, l’avocat qui décèlera, dans la procédure, une problématique de nullité, rédigera des conclusions écrites qu’il fera viser par le tribunal avant l’évocation de l’affaire.

Il est également possible de soulever des problématiques de procédure par oral, et la juridiction devant laquelle serait ainsi plaidée la nullité sera dans l’obligation de répondre à l’argumentation du prévenu sous peine d’être censurée par la Cour de cassation.

A propos d’un arrêté municipal édictait illicitement une interdiction générale de stationner non conforme aux dispositions de l’article R. 417-10 du code de la route, d’autre part, que cette interdiction ne faisait l’objet, à la date d’établissement du procès-verbal, d’aucune signalisation par panneau ou marquage au sol ;

en se déterminant ainsi, sans répondre aux exceptions d’illégalité et d’inopposabilité de l’arrêté municipal précité proposées oralement pour le prévenu, avant toute défense au fond, et reprises explicitement dans le jugement, la juridiction de proximité n’a pas justifié sa décision ;

Cass. Crim., 26 avril 2017, n°15-85909

On préfèrera toutefois la rédaction de conclusions de nullité qui permettront de développer une argumentation avec plus de précision et qui permettront de conserver une trace de leur évocation in limine litis.

Le dépôt de conclusions écrites et le fait que celles-ci soient visées par un greffier ou une greffière, avant l’ouverture des débats permettront dans l’hypothèse de l’exercice d’une voie de recours de pouvoir systématiquement s’en prévaloir.  

Vices de procédures : important de faire appel à son avocat dès la première convocation en justice

Il n’est pas rare que les conducteurs expliquent envisager le recours à l’avocat si l’audience devant le tribunal de police ou le tribunal correctionnel tourne au vinaigre. Cette stratégie peut s’avérer un mauvais calcul puisque l’avocat ne pourra plus soulever de moyens de nullité en appel si les vices de procédure n’ont pas été invoqués en première instance.

« Le demandeur ne peut critiquer la réponse donnée par l’arrêt attaqué à une exception de nullité, tirée de la tardiveté de la notification de ses droits en garde à vue, qu’il a présentée pour la première fois devant la cour d’appel, dès lors que, par application de l’article 385 du code de procédure pénale, cette exception n’ayant pas été invoquée devant le tribunal, devant lequel le prévenu a comparu, elle ne pouvait l’être pour la première fois devant la juridiction du second degré. »

Cass. Crim., 12 octobre 2022, n° 21-87.534

Vices de procédure : des règles spécifiques en cas d’instruction.

Les délits routiers les plus graves, on pense à des faits d’homicides ou de blessures involontaires pourront donner lieu à une instruction judiciaire. Dans ce cas de figure, le Code de procédure pénale prévoit un calendrier spécifique pour pouvoir faire état d’éventuels vices de procédure.

Sous peine d’irrecevabilité, la personne mise en examen doit faire état des moyens pris de la nullité des actes accomplis avant son interrogatoire de première comparution ou de cet interrogatoire lui-même dans un délai de six mois à compter de la notification de sa mise en examen, sauf dans le cas où elle n’aurait pu les connaître. Il en est de même s’agissant des moyens pris de la nullité des actes accomplis avant chacun de ses interrogatoires ultérieurs ou des actes qui lui ont été notifiés en application du présent code.

Il en est de même pour le témoin assisté à compter de sa première audition puis de ses auditions ultérieures.

Il en est de même pour la partie civile à compter de sa première audition puis de ses auditions ultérieures.

Article 173-1 du Code de procédure pénale

La requête rédigée dans l’intérêt du conducteur poursuivi devra également soulever l’ensemble des points pouvant entraîner une nullité. « A défaut, les parties ne sont plus recevables à en faire état, sauf le cas où elles n’auraient pu les connaître. »  (Article 174 du Code de procédure pénale)

Contravention et vices de procédure : attention un courrier de contestation ne vaut pas conclusions !

Le conducteur verbalisé qui contesterait son avis de contravention en invoquant différents points et notamment certains vices de procédure devra impérativement prévoir de se rendre à l’audience du tribunal de police. Le courrier de contestation (ou tout autre courrier de sa part) ne sera pas considéré par le tribunal comme valant conclusions. Le tribunal n’y répondra donc pas… Le conducteur qui ne pourrait pas se rendre au tribunal pourra s’attacher les services d’un avocat qui pourra le représenter.

C’est ce qu’a pu rappeler la Cour de cassation à différentes reprises.

Attendu que le prévenu ne saurait se faire un grief d’une insuffisance ou d’un défaut de réponse à conclusions, dès lors que les écrits qu’il a adressés à la juridiction ne valent pas conclusions régulièrement déposées au sens de l’article 459 du code de procédure pénale, faute pour lui d’avoir comparu à l’audience ou d’y avoir été représenté ;

D’où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Cass. Crim., 16 juin 2011, n°10-87568

Vices de procédure : comment les déceler ?

En pratique, l’avocat en charge de la défense des intérêts d’un conducteur poursuivi pour délit routier sollicitera auprès du tribunal communication du dossier pénal. Le dossier pénal regroupe l’ensemble des procès-verbaux qui auront été dressés dans le cadre de la procédure : le PV de constatation, le PV d’audition, les résultats d’éventuelles analyses en laboratoire, le placement en garde à vue…

C’est au cœur de ces documents que pourront se glisser telle ou telle erreur, que pourra se déceler telle ou telle violation d’une disposition du Code pénal, du Code de procédure pénale, du Code de la route…

Seule l’étude du dossier pénal permettra l’identification d’un vice de procédure. Avant la communication de ce dossier pénal, les quelques documents remis à l’intéressé ne permettront que rarement la découverte d’un problème de procédure. On rappellera qu’en matière de droit routier, les seuls documents en possession du conducteur après les faits se résument à l’avis de rétention de son permis de conduire et à une notice d’information sur le fonctionnement du permis à points. Ces documents (souvent mal renseignés pour le premier) ne sont que des documents administratifs et non des procès-verbaux, ils n’en ont pas la même force probante.

Le conducteur qui espère pouvoir bénéficier d’une relaxe découlant d’un vice de procédure aura tout intérêt à se rapprocher sans délai de son avocat pour que celui-ci puisse solliciter communication de son dossier pénal le plus en amont possible de l’audience. L’obtention rapide du dossier pénal offrira à l’avocat plus de temps pour son étude et lui offrira également plus de temps pour la rédaction des conclusions de nullité. Dans le même esprit, il pourra être utile de faire parvenir ces conclusions au tribunal bien avant le jour J pour éviter un éventuel renvoi de l’audience à une date ultérieure.

L’étude du dossier pénal même dans l’hypothèse où elle ne permettra pas l’identification de vices de procédure pourra s’évérer utile à la défense du conducteur. Outre la préparation d’une défense au fond sur les circonstances de commission d’une infraction, l’analyse du dossier pénale pourra également permettre à l’avocat et à son client de définir une stratégie de défense : reconnaissance des faits ou non, acceptation ou refus d’une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC)

Vices de procédure : attention au risque de requalification

L’avocat praticien de la matière alertera son client sur les risques de requalification. Par exemple, il ne sera pas forcément d’un intérêt évident de faire état de vices de procédure permettant d’obtenir une relaxe pour des faits de conduite sous l’empire d’un état alcoolique si la requalification en conduite en état d’ivresse ne fait aucun doute… Si dans un tel cas de figure, la rédaction de conclusions de nullité peut se concevoir dans le cadre d’une convocation devant le tribunal correctionnel, il ne pourrait être conseillé à un conducteur de refuser une CRPC pour aller se battre en correctionnel avec un risque majeur de requalification et donc de condamnation…

Nullité de la citation

La convocation en justice qui est remise au conducteur devra lui permettre pour savoir pour quels faits il va être jugé. La convocation qui demeurerait muette sur la date des faits ou le lieu de commission de l’infraction pourra ainsi être remise en cause. Mais attention, la nullité de la citation n’est qu’une invitation faite au parquet à mieux se pourvoir. La nullité de la citation entraînera la plupart du temps une nouvelle convocation en justice exempte cette fois-ci de toute erreur ou lacune. La nullité de la citation ne devra pas être perçue comme le moyen d’échapper aux poursuites mais elle pourra dans certains dossiers se révéler utile à la défense du conducteur (on pense par exemple à des problématiques de prescription ou des questions de délais).

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